Témoignage: chronique de la mission civile internationale de protection du peuple palestinien


Ramallah, le 29mars

Nous sommes à 300 mètres du palais présidentiel d'Arafat. Les chars sont en train de tourner partout. Ils ont attaqué le palais.

Nous sommes témoins actuellement des exactions de l'armée israélienne contre la population palestinienne. Ils entrent dans les maison s, ils cassent tout, ils coupent volontairement le téléphone, les lignes téléphoniques,...

Nous nous sommes portés volontaires pour encadrer les ambulances. Nous avons reçu l'interdiction formelle du consul de France parce qu'ils tirent sur les ambulances. Actuellement ils tirent sur les ambulances. On ne sait pas du tout quel est le bilan des blessés et des morts pour l'instant. Nous sommes là solidaires pour témoigner de notre intérêt pour le peuple Palestinien et pour essayer de le protéger contre la barbarie de l'armée israélienne.

Ra­mallah 29 Mars, 19h20 heure locale

Nous sommes toujours dans Ramallah actuellement, notamment toute la dé­légation française.

Nous avons appris dans l'après midi que les Israéliens avaient prévenu le quai d'Orsay qu'ils avaient donné l'ordre de tirer à vue sur toute personne dans la rue y compris les Internationaux. La journée s'est donc passée sans que l'on fasse de manifestation ou de démons­tration.

Nous avons vu les chars passer plu­sieurs fois devant l'hôtel à quelques mètres. Nous avons entendu des bruits de combat toute la journée, des bruits sourds, des tirs... On a vu des soldats descendre des blindés transport de troupes pour couper volontairement l'électricité, le téléphone... C'est un véritable sabotage organisé. Les rues sont vides, le couvre-feu est complet. Aujourd'hui, ils viennent d'attaquer le palais présidentiel d'Arafat. On n'est pas très éloigné. On entend les com­bats au loin mais tout se passe bien pour l'instant.

Ramallah, 30 Mars,6 h45 heure locale

La mission civile internationale pour la protection du peuple palestinien a décidé aujourd'hui de sortir dans la rue pour aller en groupe à l'hôpital de Ramallah donner son sang et ensuite participer à une distribution de médi­caments dans les rues en bravant le couvre-feu et en avançant malgré les chars et les tanks.

Les rues sont un peu plus calmes au­jourd'hui, il n'y a pas de tir. On n'a plus entendu de tir depuis le lever du soleil. La situation semble un peu plus calme.

Nous avons vu des lignes téléphoni­ques coupées, des maison s qui ont été investies et détruites. C'est du sabotage sans aucune raison car ce n'était pas des maison s de combattants et que les soldats israéliens n'ont pas trouvé d'armes.

Ramallah, 30 Mars 9h00, heure locale

Nous sommes deux volontaires pour entrer avec des ambulances dans Mo­kota, le palais présidentiel d'Arafat où il y a de nombreux blessés. Hier, une seule ambulance a été autorisée à en­trer. Il y avait un chauffeur palestinien et deux internationaux, un américain et une irlandaise. Les soldats israéliens ont laissé entrer l'ambulance qui a pu prendre le blessé, mais à la sortie les soldats ont chassé les deux internatio­naux. Ils ont arrêté le chauffeur qu'ils ont mis en sous-vêtements, sorti le blessé de l'ambulance et ils les ont laissés 2 heures sous la pluie.

Nous sommes donc 2 volontaires in­ternationaux qui avons pris l'engage­ment de ne pas nous séparer de l'am­bulance pour éviter les exactions des Israéliens.

Depuis ce matin, nous avons vu une série d'ambulances qui ont essayé de nous rejoindre. Mais les soldats les ont bloquées systématiquement. Ils empê­chent les gens de porter secours aux blessés et même d'emporter les morts.

Nous (internationaux et palestiniens) sommes arrives à l'hôpital de Ramal­lah au moment où il allait être envahi par les soldats israéliens pour s'empa­rer des blessés. Moment très tendu, d'autant plus qu'une ambulance venait de rentrer avec 2 cadavres. Nous avons opposé une résistance d'une telle fermeté que nous avons obtenu le départ des soldats. Nous sommes en­suite partis en cortège serré vers le QG d'Arafat et y avons pénétré. Après l'entretien avec Arafat, les 3 camara­des palestiniens qui étaient rentrés avec nous nous ont exposé leur peur d'être arrêtés à leur sortie et torturés. 34 d'entre nous ont choisi de rester.

Des interrogatoires sans vio­lence

Nous sommes donc sortis du QG en refusant d'être séparés de nos camara­des palestiniens. Embarqués immé­diatement dans des fourgons militaires nous avons été emmenés dans plu­sieurs camps israéliens de l'armée. A Bettil, puis à Ofra où nous avons été parqués dans un carré de terre entouré de barbelés. Là a eu lieu l'interroga­toire des 3 Palestiniens. Nous nous sommes opposés à ce qu'ils soient interrogés tous trois simultanément et avons obtenu qu'ils le soient un par un. Les interrogatoires se sont déroulés sans violence. Apparemment, ils sem­blaient très pressés de "se débarrasser" du problème de ces militants palesti­niens pour pouvoir s'occuper de notre expulsion.

Dénoncer l'horreur d'Ofra

Mais ils ont commis une erreur. Est ce négligence ou ont-ils voulu nous im­pressionner ? Ils nous ont laissé voir ce qu'est le camp d'Ofra, situé dans la colonie au nord de Ramallah. Des carrés de terre délimités par des fils barbelés, quelques tentes surplombées par des miradors. Et au milieu 100, 200 peut être, Palestiniens à genoux, la plupart les yeux bandés. Les 3 Palesti­niens qui étaient avec nous dans le fourgon ont reconnu un voisin, un commerçant, des gens raflés en masse, mais pas de combattants. Que se passe-t-il a Ofra? Fait-on un nettoyage ethnique ? Il faut demander a la presse qu'elle se rende a Ofra.

Enchaînés, expulsés

Nous avons été par la suite trimbalés toute la nuit. Les 3 Palestiniens ont été relâchés (ils vont bien depuis). Sous escorte, les pieds entravés, nous som­mes retournés à notre hôtel récupérer nos affaires. L'ambiance était très ten­due. Une foule de Palestiniens étaient présents. Certains ont essayé de nous donner du pain, aboiement des soldats Israéliens, bousculade générale, au cri de liberté pour le peuple palestinien repris par la foule.

Puis direction l'aéroport Ben Gourion à Tel Aviv, où nous avons été bouclés en cellule au centre de détention. Là nous avons eu droit a une magnifique pression psychologique visant à nous extorquer l'engagement de ne pas faire de procès a l'état d'Israël pour déten­tion illégale. Devinez la réponse...

«                 Pat rick